Des anticorps pour traiter les malades : une alternative crédible aux vaccins ? Gratuit
Auteur
Thèmes abordés
D’origine humaine ou de synthèse, les anticorps pourraient bientôt faire partie de l’arsenal thérapeutique employé pour lutter contre le Covid-19. Une perspective encourageante, qui permettrait de faire face aux variants du virus, contrairement à ce que laissent penser certains vaccins.

Problèmes de logistique, doutes sur leur efficacité, manque de recul sur les effets secondaires… Les mandarins qui voyaient dans les vaccins le seul et unique horizon de sortie de crise devront sûrement se montrer plus mesurés. Les vaccins d’AstraZeneca et de Moderna montrent une efficacité très limitée contre le variant sud-africain. Le pays a même suspendu l’inoculation du sérum d’AstraZeneca. Mais pendant que l’actualité ternit l’espoir de la vaccination, la question des traitements revient sur la table. Outre la multitude de molécules étudiées, testées et utilisées, les anticorps pourraient bien constituer une nouvelle voie.
De Donald Trump à Berlin
Contrairement aux anti-inflammatoires, qui visent à réduire les effets de l’infection, les anticorps ont vocation à intervenir à un stade plus précoce pour neutraliser le virus et l’empêcher d’enclencher le mécanisme inflammatoire. Voilà alors tout l’intérêt d’isoler et de synthétiser des anticorps plus efficaces pour traiter la maladie.
Ce traitement a fait pour la première fois la une des médias lorsque Donald Trump a été contaminé. En octobre dernier, le président américain a bénéficié d’un traitement expérimental à base d’anticorps monoclonaux : une famille d’anticorps efficace pour cibler des antigènes spécifiques. Confronté à une pénurie de vaccins, Berlin a sauté sur cette alternative. L’Allemagne a fait appel aux deux firmes américaines Eli Lilly et Regeneron. La première affirme que son traitement provoque une réduction de 70 % des hospitalisations et des décès chez des patients à haut risque, tandis que la seconde a annoncé des résultats intérimaires positifs pour son essai de phase 3, pour une utilisation préventive.
Efficace contre les variants
Mais la diffusion de ce traitement présente plusieurs freins. D’une part, le prix de ce traitement, qui n’est pas encore validé par l’Autorité européenne du médicament, est très élevé - environ 2000 € la dose. D’autre part, son efficacité étant très ciblée, elle risque d’être fortement réduite face aux mutations du virus. Cela ne devrait pas être le cas du traitement développé par le nantais Xenothera. Le XAV-19 est cette fois-ci basé sur des anticorps polyclonaux, dont l’efficacité ne serait « pas entamée par les variants », affirme la présidente du laboratoire, Odile Duvaux. Autre avantage par rapport aux anticorps monoclonaux : le XAV-19 aurait un effet préventif de l’inflammation.
Deux essais cliniques de la molécule ont débuté : l’un en France et l’autre au niveau européen, dont les résultats définitifs sont attendus dans les prochaines semaines. Mais après l’échec du vaccin Valneva, récupéré par les britanniques faute d’intérêt de la part de l’État, la France doit assurer cette autre entreprise nantaise de son soutien. Après avoir reçu de simples encouragements en mars, la biotech a finalement reçu le label « priorité nationale de recherche », lui accordant des financements publics. Par ailleurs, l’entreprise a engagé un dialogue en vue de précommandes et d’une production début automne. Pour l’heure, aucune information sur le prix ni sur l’efficacité précise de ce traitement. Mais selon Odile Duvaux, « les 1500 personnes hospitalisées tous les jours en France seraient susceptibles de bénéficier du traitement XAV-19 ».
Faire vivre la recherche
Une troisième voie, moins évidente, s’offre également aux chercheurs : la transfusion de plasma de convalescents. Il s’agirait d’utiliser le plasma de patients guéris du Covid-19, chargé en anticorps, pour diminuer le portage viral. Certaines études ont démontré une efficacité de ce traitement contre le virus Ebola ou encore le SRAS, qui est de la même famille que le coronavirus. Cette idée avait été soutenue par Karine Lacombe, qui avait prévu un voyage en Guyane en juillet dernier, pour démarrer l’essai « CoviPlasm ». La cheffe du service des maladies infectieuses de l’hôpital Saint-Antoine (AP-HP) avait finalement renoncé face à la pression de la population et de certains élus, qui refusaient de servir de « cobayes ». En plus de cet aspect éthique, la plupart des experts s’accordent à dire qu’il faudrait davantage d’essais cliniques pour comparer l’efficacité de ce processus à celle des soins standard.
Le problème commun de tous ces traitements est la logistique. Administrer des anticorps se fait par voie intraveineuse, donc principalement à l’hôpital. Ce qui ne risque pas d’arranger l’engorgement des hôpitaux. Mais ces projets encourageants démontrent une nouvelle fois la nécessité de faire vivre la recherche, à l’heure où l’on débat d’un « passeport vaccinal » - qui créerait une obligation vaccinale de fait - et où l’intérêt épidémiologique de cette vaccination généralisée semble de plus en plus contesté. Il est urgent que les pouvoirs publics se penchent davantage sur des traitements, plutôt que de s’obstiner à voir la vaccination comme l’alpha et l’oméga de la sortie de crise.
Thèmes abordés
.png.jpeg?w=1440&h=810)
La multiplication des tests PCR dans la population laisse entrevoir une augmentation très nette du nombre de cas dit « positifs » au SARS-CoV-2, poussant le gouvernement à prendre des mesures de plus en plus restrictives pour freiner l’épidémie. Néanmoins, la réalité de la situation reste discutable.
Thèmes abordés

ENTRETIEN. Marie-Estelle Dupont est psychologue clinicienne et psychotérapeute. Spécialiste de l’approche par la parole, elle a travaillé plusieurs années à l’hôpital avant d’exercer en libéral. Elle livre aujourd’hui à Bas les masques son point de vue sur la gestion de la crise sanitaire.