Limites et proportionnalité (partie 2)
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Bas les Masques vous propose de retrouver une grande étude du professeur Jean-François Toussaint sur la mortalité du Covid-19. Dans cette seconde partie, il dénonce l’absence de fondement d’un discours catastrophiste qui ne s’est pas vérifié dans les faits, mais qui a entraîné de nombreuse conséquences désastreuses au sein de la population.

Dans le débat de l’été, l’un des points importants était de faire comprendre que l’argument ressassé sur la culpabilisation des citoyens de ce pays n’était pas audible au regard des critères de saisonnalité. L’autre était de souligner l’ineptie de la capacité prévisionnelle des algorithmes, qui n’étaient pas calibrés pour cela, a fortiori maintenant que les Français découvrent leurs limites.
Face au catastrophisme des simulations de l’Imperial College, le présent a le plus souvent été utilisé pour décrire le réel « il n’y a pas à ce jour de 2ème vague », sans nier pour autant qu’il puisse y en avoir une.
Face à Eliot Deval [1](présentateur sur la chaîne Cnews, NDLR) il est précisé :
1. qu’il s’agit de la situation du jour, afin de montrer que les catastrophistes n’avaient pas les éléments prédictifs dont ils nous assuraient l’évidence (chaque annonce d’une nouvelle vague de mars à août s’étant soldée par un échec)
2. sans anticiper sur l’avenir, une reprise automnale éventuelle serait alors fondée sur des principes de saisonnalité virale et non de comportement [2]. Cette position était nécessaire pour que chacun puisse s’interroger, alors que la narration du réel n’est toujours pas audible. Le besoin de croire est trop fort, y compris chez les professionnels de santé et même chez certains scientifiques. Il traduit l’illusion d’une pseudo-maitrise des phénomènes naturels, si funestes soient-ils, et d’un contrôle, souvent fantasmé, de la situation.
Or le discours catastrophiste porté au cours de cette deuxième phase ne tient toujours pas : où sont passés les 9000 malades en réanimation « quoi qu’on fasse » [3] ? Les « 400 000 décès » inacceptables ? Définissent-ils un horizon encore crédible alors que cette vague atteint à ce jour le tiers de celle du printemps et qu’elle a essentiellement concerné deux tiers des régions peu ou très peu touchées en mars-avril (Figures 3 et 7).

L’existence de deux postures diamétralement opposées a néanmoins permis, après une courte phase d’incertitude (« mais qui doit-on croire ? »), d’entendre enfin des discours équilibrés provenant de non spécialistes. « Je vois une disproportion, … nous sommes mis en état d’hibernation… anesthésiés. » dit Sylvain Tesson [4], reprenant les analyses d’André Comte-Sponville, d’Emmanuel Hirsch [5], d’Alexandre Carpentier [6]et de beaucoup d’autres.
Notre réaction est-elle disproportionnée, comme tous le suggèrent ?
Alors que la mortalité toutes causes va continuer de croitre dans les prochaines décennies [7], on brise à la première alerte l’avenir des jeunes générations. On sacrifie l’apprentissage des enfants, la formation des adolescents, l’espoir et la raison de vivre d’un très grand nombre de Françaises et de Français. Dans le chœur des thuriféraires, certains se sentent même capables d’exclure leurs plus proches du cercle familial [8].
Tout cela pour quoi ? Tenter de gagner quelques mois d’espérance de vie ? Nous n’avons pourtant pas la moindre preuve de l’efficacité des mesures adoptées alors que les conséquences immenses apparaissent déjà trop criantes [9].

En termes de politique de santé publique, cela aurait pu se penser autrement.
Pour sortir de cette spirale, il semble donc souhaitable, plus que jamais, de respecter les lois, quand elles sont fondées ; de travailler à modifier ou supprimer celles qui ne le sont pas ; de respecter les gestes barrière mais de ne pas appliquer les règles sanitaires absurdes lorsqu’elles créent plus de troubles que de bien ; et de protéger les plus vulnérables dans ce naufrage : les enfants, les adolescents, les précaires, les malades et les personnes âgées.
Dans ce long hiver qui s’avance, prenez dès lors soin de vos proches et des plus démunis autour de vous, répondez aux appels de détresse. Et dans l’effondrement qui vient, soutenez les restos du cœur, le secours populaire, les associations de quartier, Emmaüs, les compagnons, les fondations. Aidez toutes celles et ceux qui, dans les banlieues, les cités, les villages, vont au contact des plus démunis réchauffer leur âme.
Ne vous enfermez plus.
Évadez-vous.
[1] La crainte du rebond. CNews 18/8/20.
[2] La saisonnalité du virus ne dépend pas du comportement des Français. Le Point, 27/7/20.
[3] A-t-on exagéré le risque épidémique ? Le Figaro, 16.11.2020.
[4] Confinement : « Nous sommes mis en état d'hibernation ». RTL, 24/11/20.
[5] L’euthanasie de notre vie démocratique risque d’aboutir à la sédition. Up Magazine, 12/11/20.
[6] Acceptons de prendre le risque raisonnable. Les Échos, 23.09.2020.
[7] La mortalité stagne à l’âge adulte pour les générations nées entre 1941 et 1955. INSEE, 13.11.2020.
[8] À Noël, « Papy et Mamie mangent dans la cuisine », selon Rémi Salomon. France Info, 25.11.2020
[9] Explosion des troubles psychiques chez les enfants. Le Monde 26.11.2020.
Le sentiment d’une vie entre parenthèses est très angoissant. Le Parisien 16.11.2020.
Dix présidents d'université réclament une jauge de 50% dès janvier. France Bleu, 25.11.2020
Précarité aux Restos du Cœur, pas question de le dire à mes parents. La Dépêche du Midi, 27.11.2020
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La multiplication des tests PCR dans la population laisse entrevoir une augmentation très nette du nombre de cas dit « positifs » au SARS-CoV-2, poussant le gouvernement à prendre des mesures de plus en plus restrictives pour freiner l’épidémie. Néanmoins, la réalité de la situation reste discutable.
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ENTRETIEN. Marie-Estelle Dupont est psychologue clinicienne et psychotérapeute. Spécialiste de l’approche par la parole, elle a travaillé plusieurs années à l’hôpital avant d’exercer en libéral. Elle livre aujourd’hui à Bas les masques son point de vue sur la gestion de la crise sanitaire.